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Authentifier la tête d'Henri IV, une enquête digne d'une affaire criminelle


Authentifier la tête d'Henri IV, une enquête digne d'une affaire criminelle


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C'est petit bout par petit bout, avec des moyens dignes d'une enquête médico-légale de cour d'assises, que des scientifiques appuyés par des historiens ont authentifié la tête du roi Henri IV, retrouvée après des siècles de pérégrinations chez un couple de retraités.

"Une enquête médico-légale à part entière", menée "avec froideur et pragmatisme" malgré les obstacles, notamment par des tests ADN de la tête, momifiée, trop détériorée pour pouvoir être exploitée, a expliqué jeudi à la presse à Paris Philippe Charlier, 33 ans, médecin légiste à Garches qui a dirigé une équipe de 20 spécialistes français, danois, italiens et américain.

L'enquête a duré six mois.

Elle a été validée par le British Medical Journal mercredi et rendue possible grâce à l'opiniâtreté de deux journalistes, Stéphane Gabet et Pierre Belet (Galaxie Presse) qui ont retrouvé la trace de la noble relique en 2008 chez deux retraités de la fonction publique. Ces derniers, passionnés d'histoire, qui conservaient la tête depuis 50 ans à Montmartre, ont accepté de la confier à la science. Les journalistes ont filmé cette aventure extraordinaire qui sera diffusée sur France 5 en février.

Une datation au carbone 14 a d'abord permis d'établir une période comprise entre 1450 et 1650, a expliqué le Dr Charlier, connu pour avoir révélé l'empoisonnement au mercure d'Agnès Sorel, favorite de Charles VII, et démontré que les restes conservés au château de Chinon n'étaient pas ceux de Jeanne d'Arc.

Correspondances anatomiques (âge, sexe, cicatrice, naevus à l'aile du nez, trou de boucle d'oreille), analyses toxicologiques, scanners, superpositions faciales...ont été systématiquement recoupés par des recherches historiques. Le roi, mort à 57 ans le 14 mai 1610, assassiné par Ravaillac, avait perdu presque toutes ses dents. Il avait un début de cataracte, une cicatrice osseuse due à une blessure à l'arme blanche, la tentative de meurtre par Jean Châtel le 27 décembre 1594.

Scientifiques et historiens, qui ont travaillé bénévolement, sont allés jusqu'à Florence (Italie) pour retrouver le protocole dressé par l'embaumeur du roi, Pierre Pigray. Il avait procédé selon une méthode dite à l'italienne.

Contrairement aux autres rois de France, le crâne de Henri IV n'a donc pas été scié pour être remplacé par de l'étoupe, mais conservé, a expliqué le Dr Charlier.

La tête a été séparée de son corps en 1793, sous le régime de la Terreur, lors la profanation de la basilique de Saint-Denis, nécropole des rois de France. Les corps, sortis des cercueils, ont été jetés dans une fosse commune. "Une véritable, foire aux reliques" s'en est suivie et "chacun s'est servi", a raconté Jean-Pierre Babelon, historien spécialiste d'Henri IV.

Elle n'est réapparue qu'au 19e siècle dans la collection privée d'un comte allemand notamment, puis en 1919 lors d'une vente aux enchères à l'Hôtel Drouot. Un antiquaire de Dinard l'a alors rachetée pour trois francs.

Après sa mort, la relique, en possession de sa soeur, a été acquise par le couple de retraités. Ils l'ont léguée au chef actuel de la maison de Bourbon, Louis de Bourbon, duc d'Anjou qui souhaite la restituer à la nécropole de Saint-Denis, a-t-il annoncé jeudi à la presse.

D'autres restes de rois et de reines, en partie recouverts de chaux vive, ont été récupérés à la Restauration et placés derrière deux parois de marbre dans la basilique, a expliqué à l'AFP le Dr Charlier.

Dagobert, Louis XIII, XIV, XVIII, Henri III, Henri II...autant de reliques qui pourraient à leur tour être précisément authentifiées, selon lui.