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Schizophrène et bipolaire, j'ai vécu l'enfer : je sais que mes démons rôdent encore


Schizophrène et bipolaire, j'ai vécu l'enfer : je sais que mes démons rôdent encore


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Bipolarité, dédoublement de personnalité... Un mystère entoure ces troubles psychiatriques qui en deviennent fascinants. Comment se manifestent ces maladies ? Est-il possible d'en guérir ? Valérie Labasse, auteure de "Vall, bipolaire... et plus si affinité" est atteinte de ces troubles. Elle nous raconte son expérience.

Enfance bercée par des insomnies, cauchemars et phobies scolaires. Les premières hallucinations, déprimes et le début des mensonges, je commençais bien dans la vie.

J'ai toujours su que j'étais différente des autres et que ma tête était malade.

C'est vers 18 ans que j'ai commencé à consulter des psychiatres, mais rien, ils m'ont gentiment fait comprendre que j'avais un côté dépressive et capricieuse, donc j'ai avalé mes premiers anti-dépresseurs.

Mary le diable, moi l'ange

J'ai commencé à avoir des pulsions de vol, de jeux, de sexe, d'agressivité, des prises de risques de plus en plus élevées, une créativité hors norme, des abus d'alcool mélangés aux médicaments et des troubles obsessionnels.

Et puis, soudain, la chute dans un puits sans fond, fatigue épuisante, envie de dormir et ne plus se réveiller, perte de la notion de temps, mélancolie profonde et toujours l'idée de suicide. Des périodes qui se répétaient de plus en plus souvent.

J'avais une vie douloureuse, car je souffrais beaucoup et mon dédoublement de personnalité n'arrangeait pas les choses. Mary était sans peur, sans scrupules, elle était le diable et moi l'ange.

La voleuse, la joueuse, la séductrice, l'alcoolique, l'arnaqueuse c'était elle, mais au final c'était moi Vall.

Un jour où j'étais perdue, Mary est apparue. Au début pour me soulager et en suite pour me posséder. J'étais une coiffeuse sans histoire, elle était sans peur relevant tous les défis et dépassant les limites. Mais une fois ses délires accomplis, c'est moi qui souffrais.

Terry et David, mes fantômes

Vers 20 ans, c'était plutôt de l'insouciance, ce que je n'avais pas saisi c'est que ce petit jeu allait devenir dangereux.

Être deux dans un même corps est une souffrance de chaque instant, et si on y ajoute les troubles bipolaires, l'équilibre est dur à tenir. Mais ce n'était rien avec ce qui m'attendait...

C'est à l'arrivée aux États-Unis, il y a 13 ans, avec mon mari et mon bébé, que tout a basculé une première fois. Me sentant seule et perdue, une forme de schizophrénie est apparue et pendant dix ans j'ai vécu avec des hallucinations, "mes fantômes". Terry et David sont entrés dans ma vie et avec eux j'ai vécu une vie secrète où se mêlaient espionnage et violence.

Une vie où Mary avait sa place, pendant des mois j'ai étudié, appris pour travailler dans un monde irréel.

Obsessions, manipulations, conflits

Un psychiatre de New York m'a parlé de bipolarité, mais très vite j'ai compris que si je racontais tout, c'était direction l'hôpital, alors j'ai triché. Il m'a diagnostiquée bipolaire et c'est un autre ami, psychiatre lui aussi, qui m'a dit que je souffrais de schizophrénie, je voulais que cela reste entre nous.
Triché pour avoir un bon traitement et le gérer moi-même, et puis vivre dans mon monde, irréel et dangereux.

Ayant toujours été passionnée de politique, j'ai profité des élections législatives des Français de l'étranger pour retomber dedans. Et ce qui devait arriver, arriva : obsessions, manipulations, conflits et j'en passe, m'ont provoqué une très grave crise et j'ai vraiment cru que la fin était proche.

C'est ce qui m'a fait prendre la décision de tout dire et surtout de commencer à écrire, pour moi et aussi pour faire comprendre cette maladie qui vous bouffe le cerveau.

Une très forte dose médicamenteuse m'a été prescrite en urgence et j'ai pu me faire soigner chez moi. J'ai enfin pris mon lithium correctement, des amphétamines autorisées aux USA, et des médicaments complémentaires.

L'écriture m'a permis d'ouvrir mon cœur

À part mon mari, personne n'était au courant, j'avais toujours manipulé ma famille et mes amis. Cette crise a donc provoqué l'effondrement de mes proches et le début d'un nouveau combat.

Faire comprendre, au début par des paroles, mais celles-ci se sont vite envolées, alors j'ai écrit... Ma famille m'a soutenue, a changé ses habitudes pour ne pas me blesser, d'autres ont disparu sans chercher à me comprendre. J'ai trouvé beaucoup de soutien et de nouvelles amitiés sur les réseaux sociaux où je communique aussi avec beaucoup des malades.

Je me demande encore comment j'ai pu écrire un livre sans jamais en avoir lu un et avec un niveau scolaire de 3e. La motivation, je pense, la rage de vouloir sortir du silence, la volonté d'ouvrir mon cœur pour me faire entendre.

Il ne m'aura fallu que quelques heures pour commencer à mettre ma vie sur le papier. Pas le temps de réfléchir ou de se poser des questions, je suis très vite rentrée dans la peau d'un auteur.

Les mots ont jonglé dans ma tête, pour finir couchés sur une page blanche.

Je sais que mes démons rôdent

Aucune crainte d'être jugée et critiquée, je me sens libre de crier, d'avouer, oui je suis une malade mentale, oui je vis avec des fantômes, oui je vis avec un dédoublement de personnalité, oui je suis très douée dans de nombreux domaines et oui j'assume tout grâce aux médicaments.

Je me suis jetée dans cette aventure, lancée ce défi de faire mon livre seule, de ne rien attendre de personne, de me livrer sans tabous ni cachoteries, pour moi, mais aussi pour les autres, ceux qui sont emmurés dans leurs secrets qui les dévorent, qui les rendent fous et qui font d'eux des incompris.

Aujourd'hui, je suis assez lucide pour tout raconter, mais je ne crois pas en la guérison.

Je suis très sérieuse dans mes prises de médicaments, je sais que mes démons rôdent alors je reste prudente, et j'envisage les électrochocs en cas de rechute importante.

J'irai jusqu'au bout pour me faire entendre et expliquer ce qui se passe dans ma tête car cette douleur horrible ne s'apprend pas dans les livres.