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Dans la petite île polynésienne de Ta'u, SolarCity et Tesla, désormais fusionnées, ont installé la vitrine de leurs capacités en matière d'énergie propre. Un coup de pub viable à long terme ?
La petite île de Ta'u, perdue au milieu du Pacifique , était jusqu'ici connue pour être le berceau du peuple polynésien, tout comme les autres îles des Samoa américaines. Ce petit territoire volcanique est maintenant sous le feu des projecteurs de Tesla et SolarCity, qui l'ont choisie il y a plusieurs mois pour y mener un projet commun : rendre l'île quasiment autonome grâce aux énergies renouvelables.
Le mariage entre la société d'Elon Musk et le producteur d'énergie solaire à peine officialisé, les deux entreprises ont voulu frapper fort en dévoilant cette semaine le résultat de leur ambitieux projet dans une vidéo promotionnelle . Dans un décor paradisiaque, entre soleil couchant disparaissant dans les vagues et forêt luxuriante, on voit ainsi se dresser les 5.238 panneaux solaires installés sur l'île par SolarCity et les 60 Powerpacks signés Tesla.
Pour cette île isolée, située à plus de 6.400 kilomètres au large de la côte ouest des Etats-Unis, cette installation est la garantie de ne plus se retrouver en panne de fuel. « Je me souviens d'une fois où ils n'ont pas été en mesure de nous envoyer un seul bateau pendant deux mois », raconte Keith Ahsoon, un habitant cité dans le communiqué de SolarCity .
L'énergie solaire offre ainsi une alternative économique au diesel en fournissant « près de 100 % des besoins énergétiques de l'île ». L'hôpital local, les écoles secondaires et primaires, les pompiers, les postes de police et les entreprises locales en bénéficient.
Le système solaire de micro-grilles (1,4 mégawatt de capacité de production pour les panneaux et 6 mégawattheures de stockage de batterie pour les Powerpacks) a été installé en seulement un an.
Les « Powerpacks » de Tesla, ces grosses batteries qui permettent de convertir l'énergie solaire et de la stocker, permettent aux habitants de s'éclairer la nuit grâce à l'énergie emmagasinée dans la journée. Ils se rechargent en entier en sept heures et, en cas d'urgence, s'il n'y a pas assez de soleil ou que les panneaux solaires sont hors service, peuvent couvrir les besoins en énergie de l'île durant trois jours.
440.000 litres de diesel économisés par an
« Mais le plus gros avantage est le coût », insiste SolarCity dans son communiqué. Le solaire « élimine les dépenses et les problèmes liés à l'expédition du diesel et fournit des coûts d'énergie stables pendant des décennies, contrairement aux fluctuations des prix des combustibles ».
C'est ce pari du coût qu'ont fait les institutions locales en investissant dans ce parc solaire. Le projet a été financé par l'Autorité de développement économique du Samoa Américain, l'Agence de protection de l'environnement et le Département de l'Intérieur, et devrait permettre à l'île d'économiser chaque année 440.000 litres de diesel.
Un coup de pub pour rassurer après la fusion
Tesla et SolarCity avaient grand besoin de ce coup de publicité. Elon Musk est parvenu à gagner son pari en concluant cette fusion avec le producteur d'énergie solaire, mais les marchés expriment des doutes sur la pertinence de cette union , particulièrement en raison de la santé financière de SolarCity, criblé de dettes et accumulant les pertes. Depuis l'annonce du projet en juin dernier, Tesla a perdu 4,8 milliards de dollars de valorisation boursière et SolarCity 86 millions de dollars.
Cette île rendue quasiment autonome grâce à Tesla-SolarCity est une preuve que brandit Elon Musk pour montrer que ses objectifs sont atteignables : Tesla a assuré que SolarCity contribuera à la nouvelle entité à hauteur de 1 milliard de dollars de chiffre d'affaires l'année prochaine.
Des conditions idéales
L'exploit de SolarCity est pourtant à relativiser. L'installation a certes été rapide et permet de résoudre une vraie problématique d'approvisionnement énergétique, mais il s'agit de conditions idéales. L'île est ensoleillée toute l'année et seulement 800 habitants y résident (873 selon le dernier recensement américain de 2010).
Il faut donc compter environ 6 panneaux solaires par habitant sur ce bout de terre de 44 km2 (plus de deux fois plus petit que la surface de la ville de Paris). Cela pousse à se demander si le solaire était réellement la bonne solution : installer des hydroliennes dans l'océan (ou des éoliennes) paraît plus pertinent que de couper des milliers d'arbres et de centraliser les panneaux au milieu de l'île, une installation peu esthétique.
C'est le choix qu'a fait l'île espagnole d'El Hierro, dans l'archipel des Canaries. En 2014, une centrale hydroéolienne a été installée , lui permettant de devenir la première île au monde totalement autonome en électricité grâce aux énergies renouvelables. Contrairement aux panneaux solaires Tesla, ce système a pris trois décennies à être installé, mais le schéma a été pensé pour s'adapter aux spécificités de l'île et pour tenir dans le temps.
L'installation de SolarCity et Tesla doit encore faire ses preuves sur le long terme, notamment dans l'entretien des panneaux solaires, avant de pouvoir être reproductible sur d'autres îles à la population et aux besoins plus importants.