ToutSurTout.biz
La fabrique de la misère


Une praticienne de la comptabilité, Eloïse Benhammou, explique comment le « capitalisme financier, système d'extorsion le mieux organisé du monde » conduirait notre société à la faillite en « s'accaparant » le pouvoir de création monétaire et en privatisant « officieusement » l'Etat réduit au « statut » de filiale...

https://www.world-lolo.com/images/uploads/image.num1481660220.of.world-lolo.com.jpg



Notre « modèle social et fiscal » serait-il voué à la cessation des paiements ? Notre douce France serait-elle déjà en « virtuel état de cessation de paiement » ? C'est l'avis d'Eloïse Benhammou, qui officie dans un cabinet de comptabilité. Depuis que« les marchés ont entraîné dans leurs rouages l'économie des sociétés toutes entières », l'économie mondiale subit une ponction parasitaire.

La praticienne des chiffres attire l'attention sur ce qui « caractérise essentiellement le capitalisme financier », à savoir « l'appropriation par des personnes privées du pouvoir régalien de création monétaire ». Celle-ci est fondée sur une « économie de la dette dont le monopole d'émission appartient aux banques ».

Ainsi, l'Etat se retrouverait réduit à une fonctionnalité d' « appareil de capture des richesses produites par le peuple » - les gouvernements successifs ne cessant pas de « mettre en place des mesures de diminution de redistribution des ressources et d'augmentation des cotisations »...

Rappel : après la dernière guerre mondiale, le gouvernement provisoire de la République française, présidé par le général de Gaulle, a mis en œuvre le programme du Conseil national de la Résistance qui a « pour principaux objectifs économiques d'évincer les trusts, de socialiser les grands moyens de production et de reprendre le contrôle de la politique monétaire » ...

Après le train de nationalisations, les féodalités économiques et financières sont expropriées et l'émission monétaire devient un service public. Mais, à partir des années 80, le « modèle anglo-saxon ultra-libéral » se met en place graduellement avec ses « trois fondements : privatisation, libéralisation et dérèglementation ».

Après le traité de Maastricht, confirmé par le traité de Lisbonne, la Banque de France n'assure plus sa fonction de création monétaire au service du bien commun et l'Etat est voué à l'impuissance politique : « Les banques spécialistes en valeur du Trésor sont devenues le pivot central du système social, politique et économique. Elles assurent la gestion des dettes de la France ainsi que la fonction régalienne de battre monnaie. En fait et en droit, le monopole d'Etat a été remplacé par un monopole privé. »

Depuis la « crise » de 2008 et l'abondante « littérature » parue sur sa supposée genèse, le lecteur soucieux de comprendre le monde où il tente de survivre tant bien que mal pourrait être convaincu de passer au laminoir d'un système de fraude généralisée dont les pratiques de spoliation ne connaissent plus de limites : « L'idéologie repose sur un principe simple : la privatisation des gains distribués sous forme de bonus et dividendes quand tout va bien : la socialisation des pertes dont la charge pèse sur les populations d'Europe en cas de crise du système » - bref, ce sont toujours « les peuples » qui paient pour se retrouver... mis au ban de la démocratie : « ce système exproprie par la contrainte de la force publique le fruit du travail de la classe productive pour le confisquer au profit de sociétés privées »...

Pour Eloïse Benhamou, « le capitalisme financier, conjugué à des intérêts industriels et commerciaux, organise un système totalitaire qui fabrique la misère ». En établissant les déclarations fiscales et sociales de travailleurs indépendants, elle a été amenée à se pencher sur le fonctionnement du RSI qu'elle qualifie d' « escroquerie en bande organisée »... Ce système de perversion kleptocratique s'exténue, à force de sur-accumulation infondée et de plus en plus visible, vers son auto-destruction annoncée, à ce qu'il semblerait : y aurait-il précisément des limites à l'acceptation de la spoliation et de la misère organisée ? Le réel reprendra-t-il un jour ses "droits" en réintégrant tous les dépossédés dans une économie aux règles assainies ?



Eloïse Benhammou, Kleptocratie française, Le Jardin des Livres, 272 p., 21€