Attentat déjoué: comment un des suspects a pu être jugé et incarcéré en France sous une fausse identité
Clément Baur, le plus jeune des deux hommes soupçonnés d'avoir projeter un attentat pendant la campagne présidentielle, a été condamné à 4 mois de prison en 2015. C'est dans sa cellule de la prison de Lille-Sequedin qu'il a fait la connaissance de son complice présumé.
La ou les cibles restent indéfinies mais le parcours des deux hommes interpellés à Marseille pour des soupçons d'attentat se précise. Déjà mardi soir, le procureur de la République de Paris, François Molins, annonçait que les deux suspects, Mahiedine Merabet et Clément Baur, s'étaient connus en prison. Si le personnel du centre pénitentiaire de Lille-Sequedin se souvient du premier, le second n'a laissé aucun souvenir. Et pour cause.
Selon nos informations, le jeune homme, aujourd'hui âgé de 23 ans, a été jugé et incarcéré en 2015 pour détention et usage de faux documents administratifs en présentant... une fausse identité, celle d'un ressortissant tchétchène, Ismaïl Djabraïlov. Son complice présumé, au casier judiciaire déjà bien rempli, purgeait lui une peine de quatre ans de prison, dont un avec sursis, pour trafic de stupéfiants. Ils se sont alors côtoyés pendant deux mois à Lille-Sequedin.
Plusieurs alias.
Clément Baur s'est converti à l'Islam en 2007. En 2015, sa famille signale sa disparition et une pratique radicale de la religion. Lors d'un contrôle au début du mois de janvier 2015, le jeune homme va présenter une fausse carte d'identité. Ce qui lui vaut d'être jugé. Devant le tribunal correctionnel de Lille, il va donner alors une nouvelle identité, cette fois-ci un nom à consonance tchétchène qui figure sur les papiers qu'il présente à la police et à la justice. L'homme est d'ailleurs proche de cette communauté auprès de laquelle il s'est radicalisé.
Lors d'un point presse à la suite des deux interpellations de mardi à Marseille, le procureur de la République de Paris, François Molins confirmait que Clément Baur "n'a eu de cesse de changer de domiciliation et d'utiliser des alias". Selon nos informations, il avait également fait une demande d'asile politique à l'Allemagne toujours sous une identité tchétchène. Il était également proche d'un ressortissant de cette communauté qui a vécu à Verviers, en Belgique, où une cellule jihadiste a été démantelée en janvier 2015.
Primodélinquant.
Après son arrestation à cette époque, Clément Baur, connu par son alias, va alors être jugé comme "X se présentant comme". Sous l'identité qu'il présente, son casier judiciaire ne comporte alors aucune mention. Jugé en comparution immédiate, les policiers n'ont pas la possibilité d'effectuer des vérifications. Pour les primodélinquants, ces dernières se complexifient alors que l'individu n'a jamais été signalisé, précise une source policière. En effet, impossible de comparer l'identité qu'il décline avec des empreintes génétiques ou papillaires si celles-ci n'ont jamais été enregistrées. Des comparaisons rendues encore plus difficiles quand les papiers d'identité sont délivrés ou relèvent d'un pays étranger.
Clément Baur est toutefois condamné à quatre mois de prison ferme et écroué. Une incarcération immédiate qui prouve, selon une source proche du dossier, que "la justice n'est pas naïve". Des recoupements ont ainsi été réalisés a posteriori menant à son interpellation mardi. "Régulièrement, plusieurs alias figurent sur les fiches pénales", poursuit-elle, notant que les cas se répètent pour les demandeurs d'asile ou les sans-papiers. Et d'ajouter: "Ce n'est ni exceptionnel, ni une découverte que des personnes présentent de fausses identités, surtout pour des affaire de détention et d'usage de faux documents administratifs."
Justine Chevalier