
Le 15 novembre 1908, le Congo devenait une colonie belge, après la cession de l'Etat indépendant du Congo (EIC) à la Belgique par le roi Léopold II.
Le roi, monté sur le trône en 1865, convoque dès 1876 une conférence géographique internationale à l'issue de laquelle est fondée une Association internationale africaine, puis une Association internationale du Congo (AIC), avec l'aide de l'explorateur britannique Henry Morton Stanley.
Le 1er juillet 1885, au lendemain de la Conférence de Berlin, destinée à trouver un accord sur le partage de l'Afrique centrale, Léopold II crée l'Etat indépendant du Congo (EIC) dont il est souverain et qui s'étend sur 2,344 millions de km2, 80 fois la superficie de la Belgique. En théorie, la Belgique, dont il est déjà le chef d'Etat, n'a aucun lien avec cette nouvelle entité politique "africaine", comme l'observe l'historien Guy Vanthemsche.
Le Sénat et la Chambre l'avaient toutefois autorisé peu avant, par les résolutions du 28 avril et du 30 avril 1885 à devenir "le chef de l'Etat fondé en Afrique par l'AIC" - en application de l'article 62 de la Constitution, qui stipulait que "le Roi ne peut être en même temps chef d'un autre Etat, sans l'assentiment des deux Chambres".
L'implication progressive de l'Etat belge au Congo, puis l'annexion de l'EIC, résulte à la fois des difficultés financières rencontrées par Léopold II dans la gestion de cet immense territoire et des brutalités commises sur les populations autochtones: régime de travail impitoyable, notamment pour produire du caoutchouc et de l'ivoire, mais aussi exactions destinées à briser toute velléité de résistance ou même tout signe de "passivité" devant l'effort productif inhumain qui leur est imposé par les sociétés commerciales opérant avec une concession et par l'administration léopoldienne.
Les mains coupées.
Ces pratiques, dont les célèbres "mains coupées", entraînent plusieurs campagnes de protestation contre l'EIC, principalement en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis, à partir de 1903. Mais en Belgique aussi, la politique du roi suscite de plus en plus d'interrogations.
Il est désormais incontestable que le régime de travail instauré par Léopold II a fait entre des centaines de milliers et plusieurs millions de victimes, conjuguées à la dépopulation causée par l'irruption des Européens, avec l'introduction de maladies nouvelles. Mais aucun bilan fiable ne peut être avancé faute d'informations correctes sur la population du Congo de l'époque, estime la plupart des historiens.
Progressivement, la pression de l'opinion publique et les manoeuvres diplomatiques conduisent donc à la fin de la souveraineté de Léopold II et à l'annexion du Congo par la Belgique en tant que colonie.
Les débats sur le fond du dossier débutent le 14 décembre 1906 à la Chambre.
"Sa Majesté déclare céder à la Belgique..."
Près d'un an plus tard intervient, le 28 novembre 1907, le traité de cession du Congo entre le roi et la Belgique. Son premier article stipule: "Sa Majesté le Roi Souverain déclare céder à la Belgique la souveraineté des territoires composant l'EIC avec tous les droits et obligations qui y sont attachés".
Ce traité dispose aussi que "l'Etat belge déclare accepter cette cession, reprendre et faire siennes les obligations de l'EIC (...) et s'engage à respecter les fondations existantes au Congo, ainsi que les droits acquis, légalement reconnus à des tiers, indigènes et non-indigènes".
Contrairement à l'EIC, qui n'avait jamais été géré par une Constitution, la Belgique dote sa colonie d'une Loi fondamentale, la "Loi sur le gouvernement du Congo belge" votée le 18 octobre 1908. Cette loi, souvent qualifiée de "Charte coloniale", prive toutefois tant les colons blancs que la population noire de tout droit politique.
Elle restera en vigueur, moyennant quelques modifications, jusqu'à l'octroi de l'indépendance au Congo, le 30 juin 1960, après 52 ans de colonisation.