Samedi 11 juillet 2020, les motards allemands ont investi les rues de Berlin. Cette manifestation résulte de la batterie de mesures motophobes émises par le Conseil fédéral allemand (Bundesrat). Parmi ces restrictions figure notamment l'interdiction de circuler le week-end et les jours fériés pour limiter les émissions sonores...
Plus de 660 motards - selon la police allemande - se sont rejoints à Berlin le second week-end de juillet avant de traverser en cortège le centre-ville. Ce « coup de gueule » fait suite à une série de recommandations liberticides émises par le Conseil fédéral allemand (Bundesrat). Transmises au Gouvernement fédéral (Bundesregierung) vendredi 15 mai 2020, elles surviennent après des plaintes dénonçant le « bruit gênant » des motos.
Pour répondre à cette problématique, les élus des 16 Länder, formant le Conseil fédéral, veulent organiser une « chasse aux sorcières », dénonce la Fema (Fédération des associations motocyclistes européennes). La proposition est en effet radicale. Il s'agirait d'interdire la circulation des motos (à l'exception des électriques) les week-ends et jours fériés. Mais pas que...
Des mesures qui font beaucoup de bruit.
Pour réduire les émissions sonores des motos, la volonté serait d'abaisser le seuil à 80 dB(A) (décibels) en toutes situations de conduite y compris à haut régime. À ce jour, la mesure du nombre de décibels requis pour homologuer une moto s'effectue à un régime donné et non sur toute la plage d'utilisation du moteur.
Dans la même veine répressive, la modification du moteur et de l'échappement, comprenez le débridage et le retrait des chicanes, exposerait à des sanctions plus sévères, allant jusqu'à l'immobilisation immédiate du véhicule. Loin du simple effet d'annonce, le gouvernement fédéral souhaite renforcer les contrôles routiers pour mettre en œuvre sa politique.
Autre annonce de taille, l'Allemagne envisage de durcir les règles en matière de verbalisation. Il deviendrait alors possible de poursuivre le propriétaire d'une machine en infraction sans avoir à prouver qu'il était le conducteur au moment des faits.
Le Conseil fédéral souhaite imposer la tenue d'un « Fahrtenbuch », c'est à dire un « journal de bord » des conducteurs pour identifier les personnes successives au guidon d'une moto.
Si le gouvernement fédéral juge ces mesures pertinentes, elles pourraient arriver sur la table de la Commission économique européenne des Nations Unies (CEE-ONU) et, pourquoi pas, s'exporter au delà des frontières allemandes.
Limiter le bruit, pas la moto !
Conscient que « la circulation est une source importante d'émissions sonores », le secrétaire général de la Fema, Dolf Willigers, trouve « logique et juste que les législateurs tentent de réduire le bruit du trafic ». Il signale cependant le caractère discriminatoire de ces mesures ciblées : « Une seule catégorie d'usagers de la route est non seulement pointée du doigt (les motards), mais elle est également menacée de restrictions abusives. Cela se traduirait par l'interdiction totale de faire de la moto certains jours dans certaines régions. C'est une chasse aux sorcières organisée contre les motards, alors que les autres usagers de la route ne sont pas inquiétés, quel que soit le bruit qu'ils émettent. Il s'agit d'une forme flagrante de discrimination doublée d'une inégalité juridique. C'est inacceptable. Nous lutterons contre cela au niveau national et européen. »
Selon la Fema, les mesures du Conseil fédéral font de la moto le seul responsable des émissions sonores dans le trafic. La fédération s'interroge sur la raison pour laquelle les constructeurs allemands de voitures haut de gamme (Porsche, BMW, Audi ou Mercedes) ne sont pas visés par ces restrictions alors que certains de leurs clients utilisent des échappements à clapet, un dispositif pour lequel on stigmatise volontiers les motards. Cela n'aurait-il pas quelque chose à voir avec le puissant lobby de l'industrie automobile allemande ?