Studio d'animation le plus connu au monde après Disney, Ghibli connait actuellement une crise majeure sans précédent, avec pour principal protagoniste son co-fondateur, le producteur historique Toshio Suzuki.

Un véritable scandale au Japon.

Depuis la sortie de son premier long-métrage en 1986, Le Château dans le Ciel de Hayao Miyazaki, le studio Ghibli est la figure de proue du cinéma d'animation japonaise. Co-créé par Hayao Miyazaki, Isao Takahata et Toshio Suzuki, le studio est derrière de très nombreux chefs d'oeuvre, tels que Mon Voisin Totoro, Le Tombeau des Lucioles, Princesse Mononoké, Le Voyage de Chihiro, Le Vent se lève ou encore Le Conte de la Princesse Kaguya.

Si Hayao Miyazaki et le regretté Isao Takahata étaient les fers de lance du studio, Toshio Suzuki était l'homme de l'ombre. Chargé de la production et de la promotion des films du studio, Toshio Suzuki a longtemps occupé le rôle de Président du Studio Ghibli, repérant et recrutant des cinéastes formés pour assurer l'avenir et la pérennité du studio : Yoshifumi Kondo, Hiroyuki Morita, Goro Miyazaki et Hiromasa Yonebayashi. Toshio Suzuki a occupé le poste de Président du studio de 1990 jusqu'en 2014, année durant laquelle il a pris sa retraite au profit du poste de Directeur général de Ghibli.

Cependant, alors que le studio s'apprête à sortir le prochain long-métrage du maître Hayao Miyazaki, Kimi-tachi wa do ikuru ka ?, le premier depuis Le Vent se lève en 2013, Ghibli est au plus mal. En effet, selon une enquête parue dans le magazine japonais Shûkan Josei, qui en 2022 nous apprenait que le réalisateur culte Sion Sono (Love Exposure, The Land of Hope) était accusé d'agressions sexuelles, le producteur Toshio Suzuki serait au coeur d'un scandale en interne, impliquant sa vie privée.

Depuis 2013, Toshio Suzuki serait amoureux d'une ressortissante Thaïlandaise, Mme Kanyada, pour qui il aurait utilisé les moyens financiers et humains du studio Ghibli. En 2018, il crée le premier restaurant officiel de Ghibli à Bangkok, capitale de la Thaïlande, et nomme comme gestionnaire Mme Kanyada. En 2020, il la nomme photographe officielle du Studio Ghibli pour un livre de photos au profit du Musée Ghibli, alors que Mme Kanyada n'est pas une photographe professionnelle.

Selon le média japonais, plusieurs employés du Studio Ghibli se serait plaint anonymement d'effectuer divers travaux au profit de Mme Kanyada, selon les souhaits de Toshio Suzuki. Le journaliste français Ludovic Gottigny, qui travaille pour l'excellent magazine spécialisé sur la culture japonaise Otomo et pour Rockyrama (deux excellentes revues dont nous vous conseillons la lecture), a listé dans un thread les différents faits qui sont reprochés au couple.

La situation aurait atteint un tel degré de gravité que le successeur de Toshio Suzuki, Koji Hoshino, lui aurait clairement demandé de faire la différence entre sa vie professionnelle et sa vie privée. Une discussion qui aurait mené à l'éviction de Koji Hoshino, qui démissionnera de son poste de Président à la fin du mois de mars, et quittera le Studio Ghibli dès le mois de juin 2023.

L'affaire Suzuki arrive au pire moment pour le Studio Ghibli. Alors que le studio japonais est dans une situation délicate depuis les échecs successifs au box-office de Le Vent se lève de Hayao Miyazaki, Le Conte de la Princesse Kaguya, Souvenirs de Marnie de Hiromasa Yonebayashi et Aya et la sorcière de Toro Miyazaki, Ghibli mise tout sur le prochain long-métrage de Hayao Miyazaki, le 14 juillet prochain, pour sortir la tête de l'eau. L'affaire, si elle prend de l'ampleur, pourrait ainsi gêner la promotion de "Kimi-tachi wa do ikiru ka ?".

Par ailleurs, nous vous informions récemment que dans le but de sauver le Musée Ghibli de la fermeture, le Studio Ghibli et la commune de Mitaka avaient conjointement lancé une cagnotte, comptant ainsi sur la générosité et la solidarité des fans. Il n'est pas impossible que la révélation des choix de Toshio Suzuki en ce qui concerne les fonds du Musée et de Studio porte atteinte à la confiance des fans et des potentiels donateurs.

On ignore quelles seront les conséquences de ces révélations ; pour l'heure, le producteur âgé de 74 ans n'a pas encore réagi officiellement aux accusations. Toutefois, dans un pays tel que le Japon où l'exemplarité est importante, une démission de Toshio Suzuki dans les prochaines semaines, voire les prochains mois n'est pas à exclure. Si tel est le cas, il se pourrait bien que, jumelée à la mort d'Isao Takahata et l'âge avancé de Hayao Miyazaki (82 ans), le départ potentiel du troisième co-fondateur du Studio Ghibli signe la fin définitive du plus grand studio japonais de tous les temps.