ToutSurTout.biz
Ce 8 juillet, Donkey Kong a 43 ans : voici sa nouvelle biographie


En 1981, Shigeru Miyamoto se voit confier une tâche de taille : sauver Nintendo d'un projet en déroute nommé Radar Scope, développé sur borne d'arcade. Plutôt que de réparer un navire en perdition, il décide de créer une aventure flambant neuve, avec un gorille géant comme vedette. Ainsi naquit Donkey Kong, qui fut développé en recyclant les bornes invendues de Radar Scope.

https://www.world-lolo.com/images/uploads/image.num1729701408.of.world-lolo.com.jpg



Avant d'en arriver là, Miyamoto avait envisagé d'utiliser Popeye comme personnage principal, tant il était populaire au Japon, mais la licence pour une adaptation en jeu vidéo ne sera pas accordée à Nintendo, ce qui poussa Miyamoto à créer ses propres personnages : Donkey Kong, que l'on connaît déjà, mais aussi un certain Jumpman, qui deviendra Mario, ainsi que Pauline, « l'ancêtre » de Peach. Oui, c'est aussi l'anniversaire de Mario, on sait, mais on lui fêtera ses 45 ans, c'est plus rond.

La raison du refus des droits pour l'utilisation de Popeye reste assez floue, puisque Nintendo avait en réalité déjà les droits pour la fabrication de cartes a jouer : alors pourquoi pas un jeu vidéo ? D'autant que la même année, un mois plus tard, Popeye sortait sur Game & Watch.

D'après une interview de Gunpei Yokoi alors superviseur du projet, la base du jeu Donkey Kong sur arcade était déjà réalisée, s'inspirant d'un court métrage d'animation de Popeye, « A dream walking », qui se déroule sur le chantier d'un immeuble en construction : tout était prêt mais suite au refus d'exploitation de la licence, l'équipe de développement s'est contenté de changer les sprites des personnages, en gardant la mécanique de jeu et l'univers déjà en place, ce qui explique que l'action de Donkey Kong se déroule également sur un chantier, avec ses iconiques poutres roses, et ce qui explique également que Mario porte une tenue de chantier telle qu'en portait les travailleurs dans les années 30, période correspondant à la sortie du court métrage de Popeye, une façon de justifier le rapport Mario/Poutres ?Certainement.

En 1980 sortait au cinéma l'adaptation live-action de Popeye, avec Robin Williams en tête d'affiche. A sa sortie, le film ne fut pas très bien accueilli par la critique, ce qui aurait pu expliquer que la licence ne soit pas exploitée dans un jeu vidéo, par peur d'un second échec. Il est aussi possible que, comme Nintendo n'était alors pas considérée comme une entreprise ayant un poids important dans le secteur du jeu-vidéo, les droits seraient gardés pour être exploités par une entreprise plus importante. Quoi qu'il en soit, on ne saura jamais vraiment le fin mot de l'histoire...

https://images.p-nintendo.com/o/2016/10/580178f623e0ca.jpg



Miyamoto, n'ayant aucune expérience en programmation, s'est entouré d'une équipe d'ingénieurs chevronnés pour donner vie à sa vision. Il voulait des personnages animés de tailles différentes qui se comportent de manière unique (une idée révolutionnaire pour l'époque, rappelons que peu de choses existaient en termes de game design). Cependant, ses premières idées, comme les catapultes pour le personnage principal, furent jugées trop complexes et furent remplacées par des plateformes mobiles et des tonneaux roulants.

Il est intéressant de noter que Mario, un des personnages les plus connus au monde (devant Mickey !), porte une moustache principalement à cause des limitations techniques de l'époque : la faible résolution des machines poussait les designers à faire preuve d'inventivité pour que les personnages puissent être facilement identifiables. Il était plus facile de dessiner une moustache qu'une bouche, et comme une moustache implique forcément une bouche, on gagne en clarté ! Idem pour la casquette de Mario : plus besoin de dessiner ou d'animer des cheveux. Tout tient parfois à peu de choses !

Pour l'anecdote, Mario fut nommé ainsi car le propriétaire de l'entrepôt de Nintendo à Washington, qui s'appelait Mario Segale, était rentré en trombe en pleine réunion pour réclamer le loyer dû par Minoru Arakawa, alors président de Nintendo of America. Après avoir réclamé son dû et dit ce qu'il avait à dire, celui-ci repartit comme il était venu, laissant l'équipe dans un certain désarroi silencieux. La seconde d'après, le nom était tout trouvé : Mario.

Le gameplay de Donkey Kong consiste en une série de niveaux de plus en plus difficiles où Mario doit éviter divers obstacles, principalement des tonneaux lancés par notre vieil ami le singe, pour sauver Pauline. Le jeu se déroule sur quatre niveaux différents, chacun avec des défis uniques. La difficulté est toujours présente, 43 ans plus tard, et encore, il n'est plus question d'y mettre des sous puisqu'à l'époque (il est bon de le rappeler pour les plus jeunes) les bornes d'arcades jouables ne l'étaient qu'à condition d'y mettre des sous, et au moment du Game-Over, il fallait raquer. Un genre de DLC avant l'heure, avec l'odeur du PMU et de la clope froide en moins.

L'origine du nom « Donkey Kong » fait débat, mais il semblerait qu'elle résulte d'une traduction littérale où "donkey" (âne, qui est censé signifier « stupide »), et "Kong" fait référence à King Kong. Le résultat ? Un nom qui pourrait se traduire par « Gorille Stupide », un choix pas si curieux pour l'époque, puisque Donkey Kong était le méchant protagoniste de l'histoire, et il est amusant de se dire que le nom a perduré tout ce temps. Il n'était probablement pas prévu à l'époque que le jeu ait un succès aussi important, et que le singe devienne aussi identifiable et connu, sinon il se serait peut-être (probablement pas) appelé Gérard Kong, qui sait.

Une légende des salles d'arcade


Lors de sa sortie, Donkey Kong a révolutionné les salles d'arcade. Avec ses graphismes colorés et son gameplay addictif, il s'est rapidement imposé comme un incontournable. Les salles de jeu aux États-Unis en demandaient toujours plus, et les ventes ont explosé, atteignant des sommets inimaginables pour l'époque : environ 60 000 unités vendues en moins d'un an. Le succès fut tel, que la borne d'arcade servit de support à certains joueurs pour tenter de devenir champions du monde, comme retracé dans l'excellent documentaire « The King of Kong », où Billy Mitchell et Steve Wiebe en sont les deux protagonistes, avec de sombres histories de triche (on vous conseille d'ailleurs vivement de regarder la critique de Karim Debbache à ce propos).

Un succès mondial et des problèmes juridiques


Donkey Kong ne s'est pas seulement imposé en Amérique, mais aussi au Japon et dans le reste du monde. Le jeu a même survécu à un procès en 1982, intenté par Universal City Studios pour violation des droits d'auteur de King Kong. Ils prétendaient alors avoir les droits de propriété intellectuelle sur les films (et l'histoire) de King Kong. À l'époque, Universal était déjà l'entreprise imposante que l'on connaît, et cherchait à capitaliser sur la popularité montante du jeu vidéo et à obtenir des bénéfices par des redevances ou des compensations.

La défense brillante de Nintendo et de son avocat John Kirby (embauché pour l'occasion par Howard Lincoln, qui rejoindra plus tard Nintendo, et qui a beaucoup œuvré notamment pour Tetris, on en parlera un jour !) a démontré que le jeu de Miyamoto n'avait rien à voir avec le film, mais également qu'Universal ne détenait plus les droits des films, puisque tombés dans le domaine public, permettant ainsi à Donkey Kong de continuer sa course vers la gloire sans encombre. À la suite de cette affaire et sortie victorieuse, Nintendo créa le personnage Kirby, en l'honneur de l'avocat du même nom : John Kirby.

https://images.p-nintendo.com/o/2024/06/667dbab0ec11c7.jpg



Concernant l'origine du nom de Donkey Kong comme évoqué plus avant, Miyamoto déclara qu'au Japon, il était commun d'appeler un singe "King Kong" de façon générale, une déclaration qui fut utilisée dans la ligne de défense de Nintendo, et certains documents judiciaires révèlent également que Donkey Kong aurait pu s'appeler (entre autres) : Funny Kong, Kong the Kong, Jack Kong, Bill Kong, Steel Kong, Giant Kong, Big Kong, Kong Down, Mr Kong, Custom Kong, Kong Chase, Kong Boy, Kong Man, Kong Fighter, Wild Kong, Rookie Kong.

Le juge finira par conclure que "Donkey Kong" était, au pire, une parodie "non sexuelle" de "King Kong" : "Donkey Kong est donc très différent de King Kong, un gorille féroce en quête d'une belle femme, qui se déchaîne, poursuit les gens, les écrase sous ses pieds ou les jette au sol, et se bat contre des dinosaures, des serpents géants, des avions et des hélicoptères, tout cela culminant dans sa mort tragique et sanglante." Et en effet.

Un impact culturel inestimable



Au fil des ans, Donkey Kong est devenu une véritable icône de la culture populaire. Il apparaît dans des films en référence comme Pixels et Les Mondes de Ralph, et a inspiré de nombreux autres jeux vidéo, tant dans les mécaniques de jeu que dans le game-design. Le personnage de Mario, lui aussi provenant du même jeu, a même surpassé le succès de Donkey Kong, devenant le visage emblématique de Nintendo.

Donkey Kong a été porté sur une multitude de consoles, de l'Atari 2600 à la Nintendo Switch avec notamment la récente annonce de Donkey Kong Country Returns HD pendant le dernier Nintendo Direct, sans oublier les merveilles développées par Rare sur la Super-Nintendo dans les années 90, que sont Donkey Kong Country (par pitié, si vous n'avez pas joué à ça, faites-le immédiatement).

Il aura également été le (heureusement bref) présentateur d'émissions jeunesse dans les années 90, mais aussi acteur, avec son passage mémorable dans l'excellent film Super Mario Bros. sorti récemment.

https://www.world-lolo.com/images/uploads/image.num1729701874.of.world-lolo.com.jpg



En conclusion, Donkey Kong n'est pas seulement un classique « indémodable » du jeu vidéo, c'est également une pierre angulaire qui a posé les fondations de l'empire ludique de Nintendo. Depuis sa création en 1981, Donkey Kong a non seulement révolutionné le monde des jeux d'arcade avec ses mécaniques innovantes et son design captivant, mais il a aussi donné naissance à un univers riche peuplé de personnages emblématiques. De Diddy Kong à Dixie Kong, en passant par King K. Rool et Funky Kong, chaque nouveau personnage a contribué à étoffer l'univers de Donkey Kong, enrichissant les aventures et élargissant l'attrait de la franchise. Ces personnages ont traversé différentes générations de consoles, chacun ajoutant une nouvelle dimension à l'expérience de jeu et captivant une audience toujours plus large. Ainsi, Donkey Kong demeure non seulement un symbole de l'innovation dans le jeu vidéo, mais aussi un témoignage vibrant de la capacité de Nintendo à créer des mondes persistants et aimés, qui continuent de fasciner les joueurs du monde entier, toutes générations confondues.