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Solenne
L'Arizona veut couper le courant à Los Angeles
Depuis l'adoption de lois jugées discriminatoires envers les immigrés, l'Arizona s'attire les foudres de la Californie. Dernière querelle en date : la menace de rupture d'approvisionnement en électricité que Phoenix fait planer sur Los Angeles.
Los Angeles est habituée aux pannes d'électricité. En 2005, une mauvaise manipulation d'une équipe d'ouvriers avait plongé deux millions d'habitants dans le noir. Mais cette-fois ci, la menace ne vient pas d'une erreur humaine mais bien d'une démarche volontaire. Celle de Gary Pierce, membre de la commission de l'énergie d'Arizona. Dans une lettre adressée au maire de Los Angeles (LA), lui-même d'origine hispanique, Pierce menace de cesser d'approvisionner la ville en électricité.
Les mots employés sont sans ambiguïté : «Si vous souhaitez vraiment vous lancer dans un boycott économique, je serais heureux d'encourager les services d'approvisionnement en électricité d'Arizona à renégocier vos contrats électriques de façon à ce que Los Angeles ne reçoive plus d'électricité produite en Arizona», écrit-il dans cette missive adressée au premier magistrat de LA, Antonio Villaraigosa. «Je suis sûr que les services d'approvisionnement en électricité d'Arizona seraient heureux de ne plus vous envoyer le moindre watt», ajoute-t-il. Selon lui, l'Arizona fournit 25% de l'électricité de la ville californienne.
Une manière forte, pour l'Arizona, de poursuivre la partie de ping-pong qui l'oppose à la Californie. La semaine dernière, le conseil municipal de Los Angeles a en effet voté la suspension des déplacements d'affaires vers l'Arizona et a proposé un réexamen des contrats liant les deux territoires. Les représailles ne se sont pas fait attendre, mais ont été balayées d'un revers de main par le département en charge de la gestion de l'eau et de l'électricité de Los Angeles. Celui-ci a en effet déclaré mercredi que le boycott de l'Arizona n'affecterait en rien l'usage du réseau électrique de Los Angeles, qui possède une partie du capital des deux centrales électriques situées dans l'Arizona.
A l'origine des dissensions, la fameuse loi SB 1070 qui confie aux policiers de larges pouvoirs. Ils pourront procéder à des arrestations si un «soupçon raisonnable» leur permet d'identifier que «la personne est étrangère» et qu'elle «réside illégalement aux États-Unis». Pour de nombreux observateurs , la formulation ambigüe du motif d'arrestation ouvre grand la voie au «délit de faciès».
«Mentalité actuelle de lynchage en Arizona»
Le conseil municipal de Los Angeles avait alors riposté en votant, la semaine dernière, le gel des déplacements d'affaires vers l'Arizona tout en remettant en cause les contrats liant les deux territoires. Les défenseurs des droits de l'homme étaient également montés au créneau. L'association des avocats spécialistes du droit de l'immigration a notamment annoncé que sa conférence annuelle ne se tiendrait pas en Arizona mais dans un autre Etat. «Nous ne nous pouvons pas en toute conscience dépenser l'argent de l'association dans un État qui déshumanise les gens que nous représentons et pour lesquels nous nous battons», explique l'association dans un communiqué.
Dans un pays qui s'est largement bâti sur la doctrine du melting-pot, la mise au ban des immigrés peut sembler incongrue. Mais pour Rodolfo Acuna, professeur à l'Université de Northridge, près de Los Angles, « la mentalité actuelle de lynchage en Arizona » rend cette «loi finalement compréhensible». Pour Nicole Bacharan, spécialiste des Etats-Unis, les autorités d'Arizona cèdent aux mouvements du tea party, qui «attaquent le parti républicain les uns après les autres. En adoptant cette loi, le gouverneur d'Arizona veut récupérer des voix en vue des prochaines élections», observe-t-elle.
60 % des Américains approuvent la loi migratoire
Dans un État où la part de population hispanique a augmenté (30% à l'heure actuelle contre 25% en 2000), le sentiment d'hostilité à l'égard des immigrés se renforce. La proximité avec le Mexique a eu un effet de contagion sur l'importation clandestine d'armes et le trafic de stupéfiants. Sur les 12 000 armes confisquées par le gouvernement mexicain en 2008, la plupart venaient des États frontaliers d'Arizona et du Texas.
Barack Obama, qui a reçu mercredi son homologue mexicain à la Maison Blanche, s'est montré ferme en condamnant sans ambages le caractère stigmatisant de la législation de l'Arizona : «Aux États-Unis, aucun individu respectueux des lois, qu'il soit Américain, immigré légal ou touriste en provenance du Mexique, ne peut faire l'objet de soupçons à cause de sa seule apparence physique», a-t-il déclaré.
L'administration Obama planche en ce moment sur la légalité du texte, dont l'entrée en vigueur est prévue dans deux mois et demi. Sa mise en œuvre reste toutefois très incertaine : «Le texte est impossible à appliquer en l'état», explique Nicole Bacharan. «La loi américaine ne permet les contrôles d'identité que pour les conducteurs de voiture ou si un acte illégal a été commis. De plus, si les soupçons des policiers se fondent uniquement sur l'origine de la personne, les lois contre la discrimination s'appliquent», précise-t-elle.
Malgré l'indignation suscitée en Californie et dans les milieux démocrates, un sondage paru fin avril montrait que plus de 60 % des Américains approuvent la loi migratoire d'Arizona.
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