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Message 1 Discussion postée le 30-05-2022 à 16:58:47

El Roslino
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Alitalia : un dernier vol avant la fermeture des portes

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Ce soir, aux alentours de 23 heures, le vol AZ 1586 d'Alitalia en provenance de la ville sarde de Cagliari se posera une dernière fois sur le tarmac de l'aéroport Fiumicino, à Rome. Et à son bord : les derniers passagers d'une compagnie aérienne mythique qui, pendant près de 75 ans, aura sillonné le ciel italien. Aujourd'hui, poussée à la faillite par des déficits historiques, l'entreprise doit définitivement couper les moteurs.

Au beau milieu de la nuit, c'est donc une page de l'histoire de l'Italie qui va se tourner. Une annonce qui, dans la rue comme sur les réseaux sociaux, suscite des réactions contrastées. Pour l'occasion, un Vénitien immortalise avec émotion son dernier décollage vers la Sérénissime quand une internaute, elle, prend le temps de remercier Alitalia d'avoir « accompagné sa vie » au fil de déplacements professionnels.

Il y a un mois, le pape François a lui aussi dû faire ses adieux aux avions de la compagnie italienne qui, pendant près de 60 ans, auront convoyé quatre héritiers de Saint-Pierre lors de centaine de vols pontificaux : de la visite de Paul VI en Terre Sainte dans les années 1960 jusqu'au dernier voyage du Saint-Père en Slovaquie, en septembre dernier.

Mais à l'heure du tomber de rideau, tout le monde n'a pas la larme à l'œil. Nombreux sont en effet les Italiens soulagés de voir définitivement condamné ce « puits sans fonds » qui, des années durant, « a engouffré l'argent du pays », peut-on ainsi lire sur Twitter.

Près de 13 milliards d'euros en moins de cinquante ans déboursés par l'État transalpin a ainsi calculé le Corriere. En effet, après un envol spectaculaire dans l'Italie d'après-guerre jusqu'aux années 80 (Alitalia, n°3 des compagnies européennes derrière la Lufthansa et la British Airways, transporte alors 10 millions de passagers par an), l'entreprise publique, accusant le coup de la libéralisation du transport aérien, connaît ses premières turbulences.

La privatisation n'y change rien
À partir des années 1990, « avec l'ouverture à la concurrence du secteur, Alitalia n'a pas su comprendre comment fonctionnait le marché. Elle n'a pas su investir sur les longs courriers par exemple et c'est là que la compagnie a commencé à perdre de l'argent (...) S'est ajouté à cela l'essor progressif des low cost », résume aujourd'hui Andrea Giuricin, chercheur à l'Istituto Leoni Bruno et spécialiste du transport aérien.

Alitalia, c'est aussi l'histoire de ratés économiques d'envergure à l'image de son mariage manqué avec le géant néerlandais KLM. Puis le veto de Berlusconi sur la reprise du groupe par AirFrance, le Cavaliere craignant à l'époque de voir les touristes se détourner des « cités d'art italiennes » au profit des « Châteaux de la Loire ».

La privatisation partielle (à partir de 1996) puis totale du fleuron aérien transalpin ne parviendra pas à freiner l'hémorragie financière, au contraire : début 2017, alors que la compagnie perd 100 millions d'euros par mois, Alitalia est placée sous la tutelle spéciale de l'administration publique pour ne jamais en sortir jusqu'à sa mise hors course définitive ce jeudi.

Mais le ciel italien ne restera pas longtemps silencieux. Vendredi matin, dès l'aube, Italia Trasporto Aereo (ITA), la nouvelle compagnie aérienne publique née des cendres d'Alitalia reprendra le flambeau. Mais avec des ambitions restreintes, prévient la nouvelle direction.

Financé aujourd'hui à hauteur de 700 millions d'euros par Rome, le dernier-né de l'aviation italienne n'a pour l'instant pu garder que 2 700 des 11 000 employés de la compagnie en déroute. Et déjà, la fronde sociale guette.

Sur le tarmac, ITA ne compte qu'une cinquantaine d'appareils (qui devrait doubler d'ici à 2025) desservant pour l'heure quarante-cinq destinations, essentiellement européennes à l'exception de quelques longs courriers. Le démarrage s'annonce « très compliqué », présage déjà l'analyste Andrea Giuricin.

« Par rapport à Alitalia, Ita est aujourd'hui une bien plus petite entreprise qui pourra difficilement rivaliser avec les grands opérateurs européens comme KLM, Air France ou la British (...) Et sur le marché domestique, avec des low cost déjà très forts et très agressifs, avec des prix impossibles à concurrencer, je pense qu'ils arrivent trop tard ».