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Philippe
« Messieurs les députés Delcourt & Cresta,
Vous avez tous deux soumis une question au gouvernement concernant la condamnation des délits d'insultes et de diffamations aggravées, questions N° 75888 et N° 75404 - http://questions.assemblee-nationale.fr … 5404QE.htm - http://questions.assemblee-nationale.fr … 888QE.htm.
Votre question au gouvernement m'alarme au plus haut point et je veux vous exposer mes arguments :
* Pourquoi réclamer une réflexion centrée exclusivement sur les injures et diffamations à l'encontre des représentants du peuple ?! Il est hors de question que nos élus bénéficient de privilèges législatifs tout simplement car ils ne sont pas plus exposés que le "citoyen lambda" : avec Internet, chaque citoyen peut avoir une vie publique, être potentiellement lu par des milliards de personnes, et donc être la cible de propos injurieux et diffamatoires.
* Pourquoi réclamer un renforcement des mesures applicables, voire de la censure administrative alors que notre corpus législatif comporte déjà les textes nécessaires ? Il s'agit de la Loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique. Celle-ci permet à tout un chacun de signaler un contenu litigieux à tout éditeur ou hébergeur informatique et d'obtenir la coopération de celui-ci. Les plateformes web (Twitter, Facebook, les journaux en ligne (Le Monde, Libération, ...)) répondent déjà positivement aux signalements qui s'avèrent fondés, et ce, en des temps records compte tenu de la réflexion à tenir (il ne s'agit pas d'avoir la main leste) !
Notez que la censure administrative, instaurée par la Loi n° 2014-1353 du 13 novembre 2014 renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme, que le gouvernement compte élargir aux propos racistes/homophobes (comme vous l'indiquez dans votre question) et que vous souhaitez voir élargir aux propos injurieux/diffamatoires, définit un principe de subsidiarité qui veut que la police s'adresse d'abord à l'hébergeur pour faire supprimer un contenu et que, passé un délai de 24h sans réponse ou sans effet, elle puisse ordonner aux fournisseurs d'accès à Internet de procéder à la censure. Autrement dit : vous ne gagnerez pas de temps par rapport à la procèdure de signalement actuelle sauf à outrepasser le délai de garde prévu par la loi, ce qui provoquera une levée de boucliers citoyenne.
* L'injure et la diffamation sont des notions juridiques difficiles à appréhender. Où s'arrête la liberté d'expression porteuse d'une critique constructive et où commence l'injure/la diffamation ? Où s'arrête la liberté d'informer ? Les actes litigieux doivent être examinés, mesurés, étudiés dans leur contexte, de manière impartiale,... Cela ne peut pas se faire au rythme d'une censure administrative par la police : cela nécessite un procès équitable.
On notera que, lorsque leurs magouilles sont découvertes, les représentants du peuple attaquent systématiquement en diffamation avant que des preuves irréfutables les accablent et qu'ils soient ensuite déboutés de leurs procès en diffamation. Je pense notamment aux cas Woerth, Montebourg, Cahuzac, Patrice Guyot & Jean-Philippe Muller (http://www.nextinpact.com/news/87400-pl … debi-1.htm),...
* L'usage massif d'Internet étant nouveau, l'expression écrite en public aussi, celle-ci n'étant pas pratiquée à l'école (dans laquelle on apprend à écrire pour faire plaisir à l'enseignant plutôt qu'à écrire pour être lu par des milliers de personnes), il est évident que l'on ne va pas obtenir de la prose et des débats construits sur Twitter ou dans les commentaires des éditions web des principaux journaux avant plusieurs dizaines d'années. L'améliration des écrits sus-mentionnés est une mission pour les enseignants de français, d'éducation civique et de philosophie, beaucoup plus que celle d'une loi visant à augmenter les peines pour injures/diffamations !
Notez que la censure administrative est une illusion : elle camoufle le propos litigieux, donne une impression de réussite au censeur, mais ne le fait nullement disparaître. Elle ne fait que mettre un rideau pour cacher la misère, l'idée continue à se diffuser sur d'autres canaux de communication. Pire, ses porteurs peuvent trouver une légitimité dans la censure : "on m'a censuré, c'est un complot d'État donc j'ai raison". En démocratie, combattre une idée, c'est contre-argumenter, ce n'est pas la censure administrative ou l'élargissement des sanctions !
En conclusion, je vous invite à réfléchir à la question que vous avez soumise au gouvernement et à revenir sur votre position actuelle qui est contraire à la démocratie et aux valeurs portées par la France, surtout la France d'après l'épisode Charlie Hebdo de janvier dernier. N'êtes-vous plus Charlie, messieurs les députés ?
Cordialement. »
Envoyé ce matin, pour tenter d'appeler à la raison des politiques qui perdent pieds de plus en plus...