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El Roslino
Fragilisée par une fuite massive des capitaux qui atteint 1000 milliards de dollars sur les dix-huit derniers mois, la Chine met subitement le holà sur ses investissements à l'étranger.
Pékin reprend les choses en main. Selon plusieurs médias, la Chine devrait bientôt prendre de nouvelles mesures contrôlant davantage les investissements des entreprises chinoises à l'étranger, dans le but de limiter les énormes fuites de capitaux qui secouent depuis 2014 la deuxième économie mondiale
. Dans le détail, selon les sources anonymes proches du dossier qui se confiées à plusieurs organes de presse, dont l'agence Bloomberg, le Financial Times et le Wall Street Journal, trois types d'investissements pourront potentiellement être interdis jusqu'en septembre 2017 : les «méga-acquisitions» dépassant les 10 milliards de dollars, les investissements immobiliers d'1 milliard de dollars réalisés par les sociétés d'Etat et, enfin, les investissements du même montant mais ciblant cette-fois des secteurs n'ayant aucun lien avec «les activités fondamentales» de l'entreprise-acheteuse.
1000 milliards de fuite des capitaux
Interprétées comme un brutal coup de frein à la politique de «Go Global» que la Chine mène depuis des années, ces dispositions ont provoqué une tempête de spéculations, hier à Pékin. Les censeurs, selon le Financial Times, sont même allés jusqu'à retirer du Web le premier jet du texte qui circulait déjà sur les réseaux sociaux chinois. Pourtant, loin de bloquer sans distinction tous les IDE (investissements directs à l'étranger) chinois, les mesures se borneraient à «prévenir les risques» associés aux acquisitions chinoises, selon la courte déclaration publiée lundi 28 novembre au soir par la NDRC, la puissante administration en charge de la Planification économique.
L'objectif, en clair ?
Faire le tri entre les opérations visant véritablement le rachat d'une marque ou d'une technologie occidentale, et celles plus suspectes, permettant aux entreprises chinoises de faire sortir en douce leurs avoirs détenus en yuan, la monnaie chinoise. Selon Bloomberg, les fuites de capitaux ont été multipliées par 7 par rapport à 2014 : au total, en 2015, l'équivalent de 1000 milliards de dollars ont quitté la Chine, du jamais-vu.
Cet inquiétant mouvement s'était enclenché suite à la dépréciation du yuan. Après avoir monté de façon continue face au dollar jusqu'en 2014, le yuan a ensuite dégringolé par rapport au billet vert, notamment après la dévaluation-surprise de l'été 2015 par la Banque centrale chinoise.
Désormais à son plus bas taux en huit ans, il ne valait ce matin plus que 0,14 dollar, contre 0,16 dollar lors du pic de janvier 2014. Les nouvelles restrictions doivent donc inverser la tendance en bloquant les entreprises qui n'investissaient à l'étranger que pour obtenir des dollars en échange de leurs yuans.
Troisième objectif, enfin : préserver les réserves de changes du pays. Pour soutenir sa monnaie, longtemps vue comme l'une des plus stables de la planète, la Chine a en effet dû puiser dans ses coffres.
Fin octobre, les réserves de change de Pékin, les plus grosses au monde, baissaient à nouveau pour tomber à 3 120 milliards de dollars (contre 4 000 milliards en 2014), soit le plus faible niveau... en cinq ans.
«Les fusions-acquisitions qui sont légitimes ne seront pas interdites. Le gouvernement veut simplement imposer des restrictions sur les sorties illégales de capitaux», analyse Oliver Rui, professeur de finance à la CEIBS, prestigieuse école de commerce de Shanghai. «Quand une entreprise chinoise veut racheter un actif à l'étranger, elle peut soit emprunter des yuans pour les convertir en dollars afin de réaliser l'opération, ou bien lever des fonds directement dans le pays-cible. Le gouvernement, avec ces nouvelles mesures, veut encourager la deuxième solution», dit-il.
La Chine, exportateur net de capital
Méga-rachat du semencier suisse Syngenta par ChemChina, prise de participation de 25% dans les hôtels Hilton par le conglomérat HNA, reprise des robots allemands Kuka par Midea, le leader chinois de l'électroménager...
Pour monter en gamme, diversifier leurs activités, ou ouvrir des marchés censés compenser le ralentissement de la croissance en Chine (6,9% en 2015, soit le plus bas niveau depuis vingt-cinq ans), les entreprises chinoises ont multiplié ces derniers mois les investissements à l'étranger, y compris dans des secteurs autrefois jugés sensibles et fermés par principe comme le nucléaire.
Après avoir reçu, pendant trente ans, des flots ininterrompus d'investissements en provenance de l'étranger, le mouvement s'est inversé : en 2015, la Chine est devenue à son tour un exportateur net de capital. Depuis cette année-là, par exemple, les investissements chinois aux Etats-Unis sont systématiquement supérieurs à ceux réalisés par Washington en Chine, selon une étude récente du cabinet Rhodium. Rien que sur les dix premiers mois de 2016, les investissements chinois à l'étranger ont atteint 146 milliards de dollars, soit une flambée de 53% en un an, selon les chiffres officiels.
«La Chine envoie un signal important au marché. Tous ceux qui comptaient faire sortir leur argent vont à présent y réfléchir à deux fois», prédit Zhao Longkai, professeur de finance à la prestigieuse Université de Pékin.
C'est en tout cas la première fois que le pouvoir communiste semble rétro-pédaler sur l'internationalisation des entreprises chinoises, pourtant une priorité de longue date. La première fois également qu'il cible spécifiquement les grandes sociétés d'Etat, les fameuses «SOEs» comme ChemChina qui avaient tant investi en Europe, aux Etats-Unis ainsi que dans les nations en développement le long des «nouvelles routes de la soie», le grand projet géostratégique de Pékin.
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