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El Roslino
Alésia, ce nom vous dit forcément quelque chose, mais quoi exactement ? Une célèbre bataille de l'Antiquité ? Ou encore une station du métro parisien ? Et vous avez raison, mais au-delà de ça, que savez-vous vraiment de ce lieu chargé d'histoire qui a changé la face de l'antiquité romaine, marqué les imaginaires et incarné plus de 150 ans d'archéologie ? Pour vous, le Daily Geek Show se penche sur ce lieu emblématique où histoire et politique se rejoignent.
Aux environs des années 50 avant J.-C., Jules César est envoyé par le Sénat romain pour pacifier les Gaules afin d'étendre l'emprise romaine et accessoirement les zones de commerce. Débutent alors plusieurs années de campagnes marquées par des rapines, des massacres et des pillages.
Les légions romaines, épaulées par des alliés gaulois « pacifiés », sont chargées de « discipliner » les peuples gaulois turbulents. Profitant des rivalités entre clans et de la possibilité de ramener beaucoup d'or et d'esclaves des Gaules, mais également d'augmenter l'influence romaine, Jules César et ses hommes mettent un certain zèle à leur ouvrage.
Mais voilà, en face, un chef gaulois du nom de Vercingétorix, élevé à la romaine, décide de se dresser face aux légions romaines. Il parvient à s'allier à de nombreux clans gaulois et mène pendant plusieurs années la lutte face à César, marquée notamment par la victoire gauloise de Gergovie. Mais l'agrégat de tribus percluses de rivalités, et malgré le charisme de son leader, ne peut rivaliser avec l'armée romaine et ses légions toujours plus nombreuses. Et en 52 avant J.-C. a lieu la bataille décisive en Bourgogne, non loin de Dijon. Les deux armées s'affrontent pendant plusieurs longues semaines à Alésia.
Les Gaulois, retranchés dans un fort au sommet d'une colline à Alise-Sainte-Reine (en Côte-d'Or) sont encerclés par 10 à 12 légions romaines. Avec l'aide d'une armée de secours, ils tentent à plusieurs reprises de franchir les 30 km de fortifications érigées par les romains. Mais chaque tentative échoue et Vercingétorix finit par se rendre ou, selon les écrits de César dans sa Guerre des Gaules, dans un geste théâtral, Vercingétorix a jeté ses armes aux pieds de César en signe de reddition. Cet acte a profondément marqué l'imaginaire des artistes et cette scène est le sujet de nombreux tableaux.
Suite à la victoire romaine, l'ensemble des Gaules est considéré comme soumis et pacifié sous l'égide de la République romaine. Un oppidum est construit à la place de l'ancien fort. C'est le début de la période gallo-romaine qui va durer jusqu'aux grandes invasions du IVe siècle qui ont fait reculer inexorablement l'influence romaine.
Le débat sur l'emplacement de la bataille d'Alésia fait alors rage pour diverses raisons, mais principalement pour des causes politiques de concurrence régionale ou encore, au XIXe siècle, comme marqueur d'opposition au pouvoir central qui soutient la localisation historique à Alise-Sainte-Reine. Devant l'importance de l'affaire, l'empereur des français, Napoléon III, lance des fouilles dès 1861 sur le site d'Alise-Sainte-Reine.
ALÉSIA AURAIT PU RESTER UNE BATAILLE PARMI TANT D'AUTRES, MAIS VOILÀ QUE LES HISTORIENS, FERVENTS DÉFENSEURS DE L'IDENTITÉ NATIONALE FRANÇAISE, Y ONT VU UN ACTE FONDATEUR
Les fouilles révèlent un très riche matériel archéologique et livrent un nombre d'ossements humains et équins ensevelis sans rites funéraires typiques des pratiques de l'époque, ce qui laisse à penser à une zone de grande bataille. L'analyse des ossements de chevaux, tout particulièrement, a mis en évidence la présence d'espèces typiquement gauloises, germaines et romaines, attestant de l'affrontement de ces trois cavaleries.
Le nombre de vestiges d'armements et les traces de fortifications attestent également la théorie de la zone d'une grande bataille. Tous ces éléments, recoupés à la description des lieux et des forces en présence dans les mémoires de Jules César, semblent corroborer l'emplacement de la grande bataille d'Alésia sur ce site.
Vercingetorix jette ses armes aux pieds de Jules César par Lionel Royer, 1899, Musée CROZATIER du Puy-en-Velay.
Cependant, d'autres sites se réclament être l'emplacement d'Alésia dont Chaux-des-Crotenay dans le Jura. Cette thèse est écartée par la communauté scientifique au vu des résultats de fouilles du XIXe siècle puis de la grande campagne de 1990.
La grande majorité du matériel archéologique découvert au XIXe siècle est maintenant conservée au Musée National d'Archéologie de Saint-Germain-en-Laye. Les résultats des fouilles des années 1990 à nos jours se trouvent en réserve dans l'ancien musée départemental aujourd'hui fermé. Le grand site archéologique de l'oppidum d'Alésia, datant de la période Gallo-romaine, mis au jour au XIXe siècle, est pour sa part visitable depuis plus de 150 ans.
L'on y trouve les restes d'un grand théâtre pouvant accueillir 4 000 à 5 000 spectateurs ainsi qu'un temple, des rues, des échoppes. Les vestiges ont été arasés lors de la construction de la ville en contre-bas, les pierres ayant été réemployées. Aussi, le site est particulièrement lisible depuis le ciel.
Théâtre antique de la ville gallo-romaine d'Alésia.
Les vues aériennes ont été d'une grande aide aux archéologues pour retrouver les routes et les zones de fortifications romaines qui s'étendaient sur une trentaine de kilomètres. Ces témoins du passé se trouvent au milieu des champs et il n'est pas rare que des éléments archéologiques refassent surface au moment des labours.
OUTRE L'ARCHÉOLOGIE, L'HISTORIOGRAPHIE RÉVÈLE QUE, DÈS LE IXe SIÈCLE, LES MOINES BÉNÉDICTINS AVAIENT FAIT LE RAPPROCHEMENT ENTRE ALÉSIA ET ALISE-SAINTE-REINE
En 1784, Pierre Laureau, écuyer du comte d'Artois, effectue des fouilles sur le mont Auxois qui permettent de mettre au jour des monnaies et des inscriptions. La découverte à Alise, en 1839, de l'inscription mentionnant ALISIIA (CIL XIII, 2880) ajouta un élément important pour l'identification du site, et malgré les débats linguistiques sur le radical celtique alis-, il est un élément déterminant de la localisation.
Depuis lors, le site d'Alésia est devenu un lieu touristique avec ses vestiges à ciel ouvert et sa grande statue de Vercingétorix réalisée par Aimé Millet en 1865.
Vue extérieure du Muséoparc d'Alésia.
Dès cette époque, Vercingétorix devient une grande figure de la Nation et de la résistance à l'envahisseur. Cette aura est renforcée après la défaite de Sedan en 1870 où la France ayant perdu l'Alsace et la Lorraine cherche des héros et des défaites « glorieuses » à l'image de Vercingétorix ou encore de Roland à Roncevaux.
Depuis 2012, l'attrait touristique du lieu est renforcé par l'ouverture du Muséoparc d'Alésia, un vaste bâtiment circulaire de 52 m de diamètre, construit par l'architecte Bernard Tschumi, rappelant l'encerclement des gaulois par les romains. Une exposition permanente dédiée à la bataille historique, des expositions temporaires annuelles et des démonstrations de batailles et de fortifications constituent l'offre de ce centre d'interprétation.
L'exposition permanente explique le déroulement de la bataille, les armements des différents belligérants, les choix tactiques et les différentes campagnes archéologiques. Elle s'attache à déconstruire les idées reçues sur les gaulois, longtemps présentés comme des barbares. Situé à 3 km des vestiges archéologiques de l'oppidum et de la statue emblématique de Vercingétorix, il doit constituer à terme un ensemble avec un musée en projet, situé sur la colline. Des fouilles d'archéologie préventive sont en cours et observables.
Riche d'une longue histoire militaire, politique et archéologique, Alésia déchaîne les passions et nous révèle un pan méconnu de notre histoire. Si cette période historique vous intéresse, nous vous conseillons Partez à la découverte des plus beaux vestiges Gallo-romains de France.
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