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Le directeur général de Stellantis devrait toucher 19 millions d'euros pour l'exercice 2021. Les finalistes de la présidentielle ont fustigé ce niveau de rémunération et les actionnaires grognent, mais le conseil d'administration met en avant la performance sur l'année écoulée.
« Choquant et excessif. » Les mots sont d'Emmanuel Macron (LREM). Les deux adjectifs ciblent le salaire qualifié d'« astronomique » de Carlos Tavares, le directeur général du groupe automobile Stellantis (dont PSA-Citroën fait partie avec Chrysler et Fiat). « Les gens ne peuvent pas avoir des problèmes de pouvoir d'achat (...) et voir ces sommes », a déploré le chef de l'État en se prononçant pour des « plafonds » de rémunération, au niveau de l'Union européenne (UE). « Bien sûr que c'est choquant », fustigeait, avec les mêmes mots, l'autre finaliste Marine Le Pen (RN), sur BFMTV.
Hasard du calendrier, l'assemblée générale du constructeur, ce mercredi, s'est déroulée entre les deux tours de l'élection présidentielle. La période a évidemment offert une formidable caisse de résonance à la polémique. Voici les chiffres, en espèces sonnantes et trébuchantes : Carlos Tavares touchera 19 millions d'euros pour 2021, dont 13 millions de variable, et des dizaines de millions d'euros d'ici cinq ans si certains objectifs (sur le cours de Bourse notamment) sont atteints...
« Pareils montants sont non seulement exagérés, mais par ailleurs totalement inacceptables dans une entreprise en pleine restructuration, tempête Denis Branche, le directeur général de Phitrust, une société de gestion, actionnaire minoritaire de Stellantis. Carlos Tavares fait du bon travail, mais ce n'est pas parce qu'il réussit qu'il doit être payé autant. Il n'a pas non plus inventé la voiture qui vole ! » De fait, d'autres actionnaires se sont étranglés puisqu'au final, 52,12 % des votants ont rejeté le rapport sur les rémunérations, alors que 47,88 % l'ont validé. Mais pas de quoi bloquer le magot. Cet avis n'est que consultatif selon les règles aux Pays-Bas, où est enregistré le constructeur né de la fusion en janvier 2021 des groupes Peugeot-Citroën-Opel (PSA) et Fiat-Chrysler (FCA).
« Le groupe Stellantis devrait mieux partager le gâteau. »
En interne aussi, les émoluments du patron font grincer des dents. Ils ont « du mal à passer auprès des salariés à qui on demande tous les jours des efforts de compétitivité », regrette la CFDT. Un poids deux mesures ? À l'issue des dernières négociations salariales annuelles, la direction de Stellantis n'avait pas proposé d'augmentation générale pour ses salariés français, mais une moyenne de + 3,2 % (+ 2,8 % pour les ouvriers) et une prime d'intéressement et de participation de 4 000 euros brut minimum par salarié.
« L'écart ne cesse d'augmenter entre les plus bas salaires et les plus hauts salaires, pointe Franck Don, le délégué syndical central CFTC. Tavares est un très bon capitaine d'industrie mais à un moment donné il faut rester raisonnable. Comment justifier une telle somme alors que certains, chez nous, ont du mal à joindre les deux bouts ? » Chez FO aussi, c'est « l'écart » avec la base qui est dénoncé. « Le groupe devrait mieux partager le gâteau, dans un contexte d'inflation galopante », insiste Olivier Lefebvre, le délégué syndical central FO.
Mais « s'agit-il de morale, ou d'économie », rétorque un cadre du constructeur en soulignant que cette politique (de rémunération) « avait été approuvée », à 87,48 %, « lors de l'assemblée générale 2021 ». Stellantis, de son côté, argue qu' « en moins de huit ans, le groupe PSA est passé d'une situation de quasi-faillite au rang d'entreprise leader de son secteur au plan mondial » grâce à la fusion avec FCA, dont Carlos Tavares a été l'artisan. Dans un contexte de crise mondiale, Stellantis a dégagé en 2021 un bénéfice net de 13,4 milliards d'euros, presque triplé par rapport à 2020.
Moins bien payé que les patrons américains.
Beaucoup trop payé, Tavares ? Quid de l'analyse comparative de la concurrence ? Sa rémunération, « à 90 % variable en fonction des résultats », demeure inférieure à celle de ses homologues nord-américains de Ford ou General Motors (GM). Mary Barra, la boss de GM a ainsi perçu 23,7 millions de dollars en 2020, soit environ 21 millions d'euros. « Peut-être que les dirigeants américains sont encore mieux lotis, mais c'est la loi du genre aux États-Unis ! » balaie Denis Branche, pour qui l'argument ne fait pas mouche. En Europe ? Herbert Diess, le patron de Volkswagen, a touché 8,6 millions d'euros l'an dernier. Du côté de Renault - de taille beaucoup plus modeste - Luca de Meo, le directeur général, devrait être rémunéré à hauteur de 4,7 millions d'euros pour 2021, dont une part soumise à des objectifs sur trois ans.
Ni la fronde des actionnaires, ni les banderilles des syndicats, quoi qu'il en soit, n'ont ébranlé l'état-major de Stellantis. John Elkann, le président, a expliqué lors de l'assemblée générale que c'était une « conviction du conseil d'administration » d'opter pour la « méritocratie » et « de récompenser les performances ». Dont acte ? Pas sûr. « Les dirigeants qui n'écoutent pas leurs actionnaires sont de mauvais dirigeants, met en garde Denis Branche, le directeur général de Phitrust. L'image de Stellantis a été abîmée. »
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