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Le Sénat gère depuis plus d'un siècle de manière autonome sa caisse de retraite et ne dépend d'aucune subvention publique. Gérard Larcher, son président, a toujours refusé d'intégrer le régime commun.
Les sénateurs, qui vont se retrouver jeudi 2 mars en séance publique pour débattre du projet de réforme des retraites, bénéficient depuis 1905 d'un régime spécial de gestion et de versement des pensions. Différent de celui de l'Assemblée nationale, doté d'une gouvernance autonome, il fait l'objet de critiques, à l'heure où le gouvernement souhaite la suppression des régimes spéciaux - à l'exception de ceux de l'Opéra de Paris, de la Comédie-Française et des parlementaires.
La Caisse des retraites des anciens sénateurs est entièrement gérée par le Palais du Luxembourg. En vertu de la séparation des pouvoirs, seul le bureau du Sénat, constitué d'élus et renouvelé tous les trois ans, peut décider de changements sur le régime créé, comme expliqué sur le site du Sénat, pour « pallier la rupture subie dans la carrière professionnelle [des sénateurs] du fait de leur élection, et à leur garantir un revenu de retraite ».
Le président du Sénat, Gérard Larcher (Les Républicains), défend depuis plusieurs années cette indépendance au nom de l'« importance que les parlementaires ne soient pas, quel que soit le pays, directement sous la pression de l'exécutif », comme le sénateur des Yvelines l'a déclaré sur France Inter, début février.
Réserves financières conséquentes.
La caisse est financée « par une cotisation des sénateurs, une cotisation employeur du Sénat et un prélèvement sur les revenus générés par les actifs financiers de la caisse », est-il précisé sur le site du Sénat, qui souligne ne pas avoir besoin de « faire appel à des transferts financiers en provenance de l'Etat ou des autres régimes spéciaux ».
Les revenus générés par le placement des actifs cumulés depuis 1905 ont permis à la caisse de constituer des fonds propres de près de 620 millions d'euros à la fin de l'exercice 2021, d'après le dernier rapport sur les comptes du Sénat. Il existe également une caisse de retraite du personnel du Sénat, au bénéfice des employés non élus de l'institution, dont les réserves étaient d'environ 736 millions d'euros, apprend-on de même source.
Grâce à cette caisse excédentaire, les sénateurs peuvent percevoir une pension confortable. En 2019, les services du Sénat affirmaient à Libération qu'après un mandat de six ans, « le montant de la pension de retraite [était] en moyenne de 2 190 euros net ». La présence d'un élu sur les bancs était souvent plus longue, la pension moyenne versée par le Sénat représentait 3 856 euros net la même année. L'âge auquel les sénateurs peuvent prétendre au versement de leur pension est fixé à 62 ans mais, sans obligation de départ en cas de réélection, l'âge moyen réel de départ à la retraite est de 72 ans, selon un chiffre communiqué à l'Agence France-Presse par le Sénat.
Pour défendre la poursuite de ce régime spécial et garantir que les réserves financières du Sénat ne soient absorbées dans le budget de l'Etat, Gérard Larcher met en avant les trois réformes adoptées par le bureau en 2003, 2010 et 2014 pour suivre celles décidées pour l'ensemble de la société et aboutir à des règles « analogues à celles qui sont appliquées aux fonctionnaires de l'Etat ».
Jusqu'en 2010, un double système de cotisation permettait aux sénateurs de toucher une retraite à taux plein après vingt-deux ans et demi de mandat. Depuis, ce système a laissé place à une complémentaire à points. La durée de cotisation a été relevée progressivement pour atteindre quarante-deux ans à compter du 1er janvier 2021 et continuera à augmenter régulièrement, jusqu'à quarante-trois ans à l'horizon 2033.
La gauche pousse pour une « réflexion » sur le régime.
Le président du Palais du Luxembourg affirme, par ailleurs, que la chambre transposera pour son propre régime de retraite les nouvelles règles qui seront adoptées dans la réforme actuellement en débat, portant notamment à 64 ans au lieu de 62 ans l'âge légal de départ. « Les sénateurs l'ont déjà fait à chaque réforme des retraites, ils ont ajusté l'âge, les principes de cotisation », rappelait-il début février sur France Inter.
Toutefois, certains des sénateurs de gauche considèrent qu'une « réflexion » plus globale sur ce système de retraite doit être engagée, à l'heure où certains régimes spéciaux sont visés par la réforme et au nom de « l'exemplarité » et de la « transparence » dues à leur fonction. A l'initiative des écologistes, rejoints par leurs pairs socialistes et communistes, une proposition de résolution - par définition non contraignante - visant à réformer la caisse de retraite des anciens sénateurs a été déposée, citant l'exemple de l'Assemblée nationale, qui a « aligné son régime de retraite sur le droit commun de la fonction publique depuis le 1er janvier 2018 ».
Dans leur texte, les élus estiment que « si des efforts sont demandés à la population, les parlementaires doivent partager ces mêmes efforts » et souhaitent également « proscrire les investissements issus des réserves de la caisse dans les projets d'énergie fossile ». Rien ne dit pour l'heure qu'une refonte plus importante de ce régime spécial aura lieu.
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